Dans nos mains

Avec nos mains, nous prenons. Nos mains font de nous d'irrémédiables prédateurs, voraces, avides. Insatiables. Pourtant, elles ont autre chose à faire et elles savent très bien le faire : donner. Et quand bien même, nos mains seraient vides, elles ont encore à offrir douceur, tendresse, amour... On a toujours une main à tendre.
Tes mains sont le premier poème
celui qui défroisse et apaise
quand mon pas mal tenu
parvient jusqu'au matin
et vacille
sur le sol flou de l'univers
premier poème
où l'on pressent la chaleur qui guérirait
et soudain l'on vacille
heurté par le vent
et sa question enfiévrée
premier poème encore
fruit cassé par la dent
pour que la saveur advienne
d'une eau dénouée
et l'on sait trop soudain
ce que l'on quitte
ce sont tes mains précises
qui versent le matin
Jean-Pierre Siméon, Lettres à la femme aimée au sujet de la mort, Cheyne éditeur et Gallimard.